La première discussion incluant les sept chefs principaux de liste a marqué une avancée substantielle dans la campagne européenne le dimanche 5 mai. L’émission Le Grand Jury, co-organisée par RTL, Le Figaro, M6 et Paris Première, en association avec La Chaîne parlementaire (LCP), a été la scène de débats de plus de deux heures entre Jordan Bardella du Rassemblement national (RN), Valérie Hayer de Renaissance, Raphaël Glucksmann du Parti socialiste-Place publique, Manon Aubry de La France insoumise, Marie Toussaint des Ecologistes, François-Xavier Bellamy des Républicains et Marion Maréchal de Reconquête !.
Ce fut la première participation de Jordan Bardella dans une telle discussion, laissant auparavant son espace à l’eurodéputé Thierry Mariani et à l’ex-chef de Frontex, Fabrice Leggeri, pour représenter la RN le 10 avril et le 14 mars respectivement.
Des sujets comme la guerre en Ukraine et la défense européenne ont été abordés.
François-Xavier Bellamy a insinué que la stratégie d’Emmanuel Macron concernant un éventuel déploiement de troupes en Ukraine était incertaine et que le soutien apporté à Kiev devrait plutôt se traduire par des armements. Valérie Hayer, candidate Renaissance, a souligné le danger d’un affrontement direct avec la Russie, appelant à renforcer la défense de l’Europe. Elle a également critiqué les positions du Rassemblement national (RN) vis-à-vis de la Russie. Mme Hayer émet l’idée que si la Russie l’emporte en Ukraine ou si la Pologne subit une attaque, cela nous affecterait également, mettant ainsi en garde contre toute complaisance envers la Russie.
Jordan Bardella, du RN, a exprimé sa volonté de soutenir l’Ukraine tout en évitant une escalade avec la Russie. Plusieurs candidats ont ciblé Bardella durant le débat. Marie Toussaint, par exemple, l’a accusé d’être un « agent étranger » et l’a critiqué pour son manque de soutien à l’indépendance de l’Europe du gaz russe lors des votes au Parlement européen. Mme Toussaint a également condamné le soutien apparent du RN envers la Russie, rappelant le manque de solidarité de M. Bardella face aux condamnations du Parlement envers l’emprisonnement de l’opposant russe Alexeï Navalny, qui est maintenant décédé en prison. De plus, Manon Aubry a reproché à Bardella son bilan en tant qu’eurodéputé. Selon elle, le RN n’est plus un parti nationaliste mais un parti de paresseux.
La discorde entre Israël et le Hamas a été un sujet brulant lors des débats récents. Le candidat du parti Les Républicains a critiqué La France insoumise pour ce qu’il considère comme une justification du terrorisme : « Il est affligeant de constater que LFI exploite la justification du terrorisme », a-t-il déclaré. « Un civil tué à Gaza ne vaut-il pas autant qu’un civil tué en Ukraine ? », a demandé la tête de liste de LFI.
Transition écologique et problèmes environnementaux
La transition écologique est un autre sujet sur lequel l’opinion des candidats variait considérablement. Plusieurs d’entre eux ont exprimé leur désaccord concernant l’interdiction prévue des ventes de voitures thermiques neuves dès 2035. Jordan Bardella et Marion Maréchal-Le Pen ont notamment décrié cette mesure, estimant qu’elle pénalise le pouvoir d’achat des citoyens et représente un danger pour l’industrie automobile, en favorisant les importations chinoises. Valérie Hayer, quant à elle, a précisé que cela ne signifie pas « d’interdire subitement l’utilisation de voitures thermiques aux Français », mais plutôt de « permettre la continuité de l’usage de voitures thermiques d’occasion ». Raphaël Glucksmann, de son côté, a soutenu le développement de la voiture électrique européenne.
Marie Toussaint a insisté sur la nécessité d’instaurer une « TVA verte et circulaire réduite sur les produits bénéfiques pour la santé, l’environnement et l’emploi ». Raphaël Glucksmann a proposé l’adoption d’une loi « Acheter Européen », semblable à la loi « Buy American Act » aux Etats-Unis, qui favoriserait les produits et services européens pour les achats publics. Cela nécessite également un investissement massif dans les industries vertes. François-Xavier Bellamy a posé la question non pas en termes d’empêcher les Français de vivre, travailler et produire, mais plutôt de savoir comment aider les autres pays à se décarboniser.
Le débat s’est rapidement axé sur la crise dans le secteur agricole. Jordan Bardella et Marion Maréchal-Le Pen ont mis l’accent sur l’ampleur des « régulations et des restrictions qui rendent la vie de plus en plus difficile pour nos fermiers », tandis que Valérie Hayer a souligné qu’ils étaient les premières victimes du changement climatique. Elle a également mentionné que la dernière révision de la Politique Agricole Commune (PAC) visait trois objectifs principaux : « soutenir la transition écologique, améliorer les revenus des fermiers et s’engager vers la souveraineté alimentaire ». François-Xavier Bellamy et Jordan Bardella ont critiqué la stratégie « Farm to the Fork » (« de la ferme à la fourchette », lancée en octobre 2021), qu’ils jugent synonyme de « décroissance de la production agricole ». Par ailleurs, Manon Aubry plaide pour une « transformation du système agricole » et l’arrêt des « accords de libre-échange ».
Concernant la question de l’immigration en Europe, Manon Aubry défend un accueil « respectable » pour les migrants. Selon elle, la politique migratoire européenne est « inhumaine et inefficace car elle transforme la Méditerranée en un grand cimetière à ciel ouvert ». En outre, la candidate de la France Insoumise considère que l’agence Frontex représente « une machine à tuer aux frontières de l’Union européenne », faisant allusion à Fabrice Leggeri, troisième de la liste RN, faisant l’objet d’une plainte pour complicité de crimes contre l’humanité.
Jordan Bardella et Marion Maréchal-Le Pen sont favorables à l’idée de « refouler » et de « renvoyer » les bateaux d’immigrants. Selon Bardella, candidat RN, la France s’est transformée en un centre social accueillant l’immigration du monde entier. Raphaël Glucksmann rétorque à cette affirmation en disant que leurs appels pour une « immigration zéro » ne correspondent pas à la réalité. Il ajoute qu’il est nécessaire de stopper cette hypocrisie qui entraîne le chaos et porte atteinte à la dignité humaine.
Bien que les candidats de droite considèrent qu’il y a une surpopulation immigrée en France, Marion Toussaint soutient que l’immigration est nécessaire. Manon Aubry questionne ensuite Bardella concernant l’accueil des réfugiés ukrainiens en France, à quoi il répond qu’il est favorable, à condition qu’il ne s’agisse pas de réfugiés afghans, faisant référence au meurtre de Matisse, un adolescent de 15 ans, tué par un adolescent afghan.
Lorsqu’ils sont interrogés sur le concept de « remigration », instauré récemment par le Royaume-Uni, Bardella et Maréchal-Le Pen expriment tous deux leur volonté de « renvoyer les immigrants illégaux ». Maréchal-Le Pen a souligné qu’il y a un certain nombre de personnes présentes sur le sol français qui n’ont aucune raison d’y être.
Elle a fini par déclarer une guerre économique contre la Chine.
À quelques heures de l’arrivée du Président chinois, Xi Jinping, en France, Raphaël Glucksmann a regretté la répétition des erreurs passées par l’établissement d’une amitié avec « le parrain principal de la guerre de Poutine » et l’acceptation de la « servitude des Ouïgours ». Glucksmann, candidat du Parti socialiste et de Place Publique, a plaidé pour une fin de l’innocence et une approche plus ferme face à la concurrence injuste de Pékin. François-Xavier Bellamy a approuvé cette position en critiquant la « stratégie d’anéantissement de l’économie européenne » de la Chine.
Néanmoins, Valérie Hayer (Renaissance) a répondu que la Chine reste un acteur clé dans plusieurs domaines tels que la lutte contre le changement climatique et a souligné la mise en place de mesures telles que l’exigence de réciprocité dans l’accès aux marchés publics. L’écologiste Marie Toussaint a insisté sur l’importance d’imiter un « Buy Green and European Act », en introduisant une préférence européenne pour les marchés publics, et de prôner l’extension de la taxe carbone aux frontières du continent.
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