Malgré les efforts des cinq dernières années en matière de politiques éducatives favorisant l’égalité, nous voyons encore la persistance de stéréotypes de genre dans l’orientation scolaire. Notre discussion est basée sur les recherches de Christine Morin-Messabel, une professeure de psychologie sociale et chercheuse à l’université Lyon-II, dont la thématique principale est le genre dans le système éducatif depuis deux décennies. Elle nous aide à comprendre que ces stéréotypes sont le produit d’une société qui influence le système éducatif, et souligne l’importance du rôle des enseignants pour y résister.
Au lycée, on peut identifier les différences dans l’approche des étudiantes et des étudiants vis-à-vis de leurs études avant et après le baccalauréat. Les stéréotypes de genre affectent la manière dont les élèves se forment tout au long de leur parcours scolaire. Lors du choix des matières majeures, appelées « triplettes », en première, on constate une sous-représentation des filles dans les matières scientifiques. Cette tendance ne change pas beaucoup par rapport à l’année précédente, même si un peu plus de filles choisissent les mathématiques. Les filles sont peu présentes dans les matières telles que les sciences de l’ingénieur et les sciences numériques et informatiques. Par contre, elles sont plus présentes dans les lettres et les matières liées aux soins, comme les filières techniques du social et du paramédical. Ces choix se poursuivent après le bac, avec des filières fortement marquées par le genre.
La socialisation est au cœur de tout cela, associant souvent les mathématiques à des qualités typiquement masculines telles que la rationalisation, tandis que le français est connecté à des capacités considérées féminines, comme la communication. Une recherche de 2023 menée par Pascal Huguet, directeur des études de psychologie sociale expérimentale au CNRS, a révélé que les élèves étaient enclins à croire à un meilleur succès scolaire des garçons dans les sciences et des filles dans d’autres matières. L’étude a également souligné une anxiété plus marquée chez les filles envers les mathématiques et une confiance générale moindre, influant sur leur estime de soi.
L’aspect fascinant réside dans le fait que l’enquête Pisa dévoile que, dans certains pays, les filles surpassent les garçons en mathématiques. Comprendre que ces disparités varient selon les nations permet de déconstruire le problème essentiel.
Qu’en est-il du rôle de l’enseignant, positif ou négatif, dans la progression de ces perceptions stéréotypées ?
L’école représente un endroit où l’on peut combattre la force des stéréotypes et le lien entre genre et discipline. Les éducateurs prennent en compte ces problèmes, ils disposent des outils et des connaissances nécessaires pour promouvoir l’égalité. C’est un processus qui nécessite une réflexion dès l’école maternelle : quelles aires de jeux proposer, quelles histoires pour enfants présenter à la classe, quels livres ou textes de lecture sélectionner ? Chaque détail peut véhiculer des idées préconçues et il est crucial de se questionner sur le type de modèle à diffuser. Dans le cadre des apprentissages, cela implique également de renforcer la confiance et le sentiment de compétence des filles, pour démentir la notion selon laquelle les garçons seraient naturellement plus talentueux. Il est essentiel de fournir des modèles, comme des mathématiciennes ou des ingénieurs, pour que les filles puissent se reconnaître en eux.
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