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Crime organisé : modèle italien fragile

Dans la péninsule italienne, mille personnes sont dispersées loin de leur lieu d’origine et des endroits où leurs crimes ont été commis. Ces individus aux noms d’emprunt vivent sous une identité cachée, n’apparaissant en témoins dans les procès qu’à partir d’un bunker sécurisé. Ces collaborateurs de justice, ou « repentis » (pentiti), jouent un rôle clé dans la lutte contre la mafia italienne depuis plus de trois décennies. Des témoins précieux aux yeux des juges spécialisés, ils sont vus comme des traîtres par leurs adversaires. Ils vivent constamment sur le fil du rasoir, comme le suggère l’expression « morts qui marchent », après avoir choisi de rompre le code du silence (omertà).

L’histoire de la collaboration de justice commence dans les années de plomb, au cours des années 1970, une période où la violence politique mettait en péril l’État de droit. Le premier cadre légal a été établi en 1980 pour lutter contre le terrorisme, avant d’être étendu en 1990 aux crimes organisés sous l’initiative du juge sicilien Giovanni Falcone, pionnier de la lutte anti-Mafia en Italie. Falcone a testé ce système avec l’aide d’un informateur important, Tommaso Buscetta, surnommé le « boss des deux mondes », un ancien leader de la Cosa Nostra qui était revenu des États-Unis pour révéler les secrets de ses complices. Les aveux de Buscetta ont mené au grand procès de Palerme en 1986-1987, au cours duquel 360 membres de la mafia ont été condamnés.

Une structure spécifique et rigoureuse a été établie pour gérer l’implication du crime organisé, distinguant entre les juges-confesseurs d’un côté, et le Service central de protection, chargé de la sécurité des individus qui ont officiellement rejoint le « programme ». Plus de 5 000 personnes, incluant les familles proches et environ soixante « témoins de justice » qui ont choisi de signaler les actions de la mafia, sont impliqués en tout.

Le but est de « dévoiler des réalités criminelles obscures ». Les règles sont bien définies: une fois qu’un détenu a décidé de collaborer, il a cent quatre-vingts jours pour prouver son sérieux et la validité de ses révélations. Les renseignements fournis doivent être « nouveaux », « complets » et « conclusifs ». En retour, il peut obtenir une réduction de peine, des dispositifs de protection pour lui et sa famille (réinstallation, anonymat, etc.), ainsi qu’un revenu mensuel d’environ 2 000 euros par ménage. Cependant, la moindre erreur ou lacune de mémoire entraîne un retour en prison. C’est précisément ce qui est arrivé récemment à Francesco Schiavone, le chef historique du clan de Casal di Principe de la Camorra, qui a décidé de se repentir à 70 ans, mais qui n’a pas réussi à convaincre les juges napolitains après trois mois d’entretiens. Les informations complémentaires sont réservées aux abonnés.

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