Il y a deux décennies, le statut du « repenti » a été voté par le Parlement français, perçu comme un progrès significatif dans la bataille contre le crime organisé. Néanmoins, malgré son succès en Italie et aux États-Unis, ce nouvel élément judiciaire n’a pas été salué par l’opinion publique, les autorités ou la politique. Alors qu’il pensait gagner enfin sa légitimité grâce à une nouvelle loi devant être présentée en automne, la dissolution de l’Assemblée nationale fin juin et une vacance gouvernementale ont entraîné une autre issue.
Cette histoire est l’illustration d’une opportunité manquée. D’abord, illustrant une négligence flagrante, la Commission nationale de protection et de réinsertion (CNPR), également appelée « repentis », créée par la loi Perben 2 en 2004, a dû attendre dix ans pour entrer en vigueur, faute de décret et de financement. Avec un budget annuel de 780 000 euros à présent, au 1er janvier, la CNPR ne protégeait que quarante-deux individus, y compris les repentis et leurs proches, avec une majorité impliquée dans le trafic de drogues. Le programme italien, en comparaison, compte mille repentis sans même inclure leurs familles. On espérait que ce gain apporterait un équilibre dans le système judiciaire face à la sophistication de la mafia. Un souhait idéaliste.
L’écriture de la loi concernant la repentance est considérée comme une faute innée du système, car elle était supposée fournir un accès sans précédent à l’univers des délits organisés. Néanmoins, en 2004, pour des raisons éthiques, le législateur a décidé d’exclure de ce programme les individus poursuivis pour des actes criminels sanglants. L’évaluation de la repentance ne se basait pas uniquement sur l’efficacité, mais également sur la proximité avec le mal. Le président actuel de la CNPR, Marc Sommerer, a exprimé sa déception face à la sénat le 12 février en raison de la complexité du système qui entraîne des conséquences peu cohérentes.
Bruno Sturlèse, qui a présidé la CNPR de 2017 à 2023, y voit l’illustration d’un « manque de pragmatisme au sein d’une vision excessivement catholique de la culpabilité ». Selon lui, « le législateur a choisit de se focaliser sur l’aspect symbolique de la repentance en basant son projet sur des hypothèses concernant le degré de repentir d’un criminel et sur son niveau d’acceptabilité sociale ». Par conséquent, en raison de l’interdiction légale d’obtenir les aveux d’une personne repentie poursuivie pour un délit de sang, les juges doivent contourner cette règle en initiant des procédures parallèles où les criminels sont poursuivis pour des délits mineurs, ce qui les rend éligibles à la repentance. Cette approche, qui est contraire aux principes du débat contradictoire, affaiblit le dossier.
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