Ahmed Hachani, le Premier ministre tunisien, a été destitué par le président Kaïs Saïed mercredi soir du 7 juillet, une décision annoncée par une simple déclaration sur les médias sociaux. Kamel Madouri, le ministre des affaires sociales a été désigné pour le remplacer sans plus de précisions de la présidence. Cela rappelle l’occurrence quand Hachani a pris la relève du gouvernement le 1er août 2023 après le renvoi inexpliqué de Najla Bouden.
Hachani, après un an en fonction, a souligné les réalisations de son gouvernement dans deux vidéos diffusées sur les réseaux sociaux le même mercredi. Il a cité l’augmentation du salaire minimum, l’initiative de gestion des ressources en eau, ainsi que les propositions de révision du code des changes et du code du commerce.
Sur la scène internationale, Hachani a eu le privilège de représenter la Tunisie à de nombreuses occasions. Il a participé à une série de voyages, où il a assisté au Forum de Davos en Suisse en janvier, rencontré son homologue français, Gabriel Attal, à Paris en février, a assisté au sommet Corée-Afrique à Séoul et également au sommet du G7 en Italie du Sud en juin et, a participé au Forum sur les migrations transméditerranéennes à Tripoli en juillet.
Face à l’instabilité socio-économique, la Tunisie est aux prises avec un chômage élevé, une inflation incontrôlable et une pénurie de nombreux produits essentiels, y compris la nourriture. De plus, le pays est frappé par une crise environnementale affectant l’eau et la gestion des ressources lors de cette saison estivale. Un juriste de 67 ans sans expérience politique préalable à son poste au sein de la Banque centrale de Tunisie n’a pas réussi à se faire une place significative dans l’espace public, minimisant ses prises de parole publique.
Selon l’analyse du politologue Hamadi Redissi, suite au licenciement de Najla Bouden, la Constitution a rebaptisé le rôle de chef de gouvernement en assistant du président, réduisant ainsi ses pouvoirs en faveur du président, en raison des initiatives de Kaïs Saïed.
Est-ce que Kamel Madouri est capable de faire la différence? Né en 1974 à Téboursouk (nord-ouest), il a également une orientation technocratique. En tant que chercheur en droit spécialisé dans les relations tuniso-européennes et membre de diverses commissions mixtes sur la sécurité sociale, il a fait carrière dans plusieurs institutions publiques de l’État providence avant d’être nommé directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) en février 2023. Son implication récente en politique résulte d’un remaniement partiel du gouvernement conduit par Kaïs Saïed qui l’a nommé ministre des affaires sociales en mai, remplaçant Malek Ezzahi.
C’est deux mois avant les élections présidentielles du 6 octobre que ce changement est intervenu. Kaïs Saïed, qui avait remporté l’élection en obtenant une majorité conséquente il y a cinq ans, cherche à conserver sa position. Depuis le 25 juillet 2021, quand le Parlement a été suspendu, la Tunisie est entrée dans une phase autoritaire. Le président a monopolisé tous les pouvoirs, y compris celui de justice. L’adoption d’une constitution hyperprésidentialiste a abouti au démantèlement des institutions démocratiques issues de la révolution. Le Parlement a été dissout, les opposants sont réprimés, certains même mis en prison, et les libertés individuelles sont restreintes.
Dès le début de la campagne le 14 juillet, les candidats potentiels ont rencontré des difficultés parcourant le processus électoral et respectant les délais prescrits. Deux des candidats, Nizar Chaari, un animateur de radio et producteur, et Kamel Akrout, un amiral retraité, ont décidé de ne pas se présenter, car ils n’ont pas pu obtenir une attestation de non-condamnation pénale nécessaire pour leur dossier de candidature. La candidate Abir Moussi, en dépit de son incarcération, a été condamnée à deux ans de prison pour avoir diffusé de fausses informations, conformément au décret 54.
Cependant, Kaïs Saïed, qui a déjà soumis son dossier de candidature, a rejeté toute allégation de répression politique, en affirmant simplement que « la loi est la même pour tous ».
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