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4 avril 2024 9 h 11 min

« Terre: Pas Encore dans l’Anthropocène »

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Le terme « anthropocène », popularisé par le chimiste atmosphérique et lauréat du prix Nobel 1995, Paul Crutzen, au début du nouveau millénaire, s’est largement diffusé dans la société. Il laisse entendre que l’anthropocène, une ère géologique dominée par l’impact humain, est bel et bien inscrite dans le marbre de l’échelle géologique du temps, prenant la suite de l’holocène (débutant il y a 11 700 ans) et du pléistocène (de -2,6 millions d’années à -11 700).

Cependant, l’Union internationale des sciences géologiques (IUGS) a récemment rappelé que cette perception n’est pas nécessairement précise. Au terme d’une procédure formelle entamée il y a quinze ans, cette autorité académique, responsable de la gestion des tables stratigraphiques, a refusé d’inscrire l’anthropocène comme période géologique. Ainsi, du point de vue des géologues, la Terre n’est pas entrée dans une nouvelle phase de son histoire.

Le 21 mars, l’IUGS a officiellement annoncé le rejet du concept d’une ère anthropocène comme unité formelle de l’échelle des temps géologiques. Le vote en question, dont les résultats ont été publiés le 5 mars par le New York Times, avait eu lieu deux semaines plus tôt au sein de la sous-commission pour la stratigraphie du quaternaire (SQS), une instance de la Commission stratigraphique internationale (ICS), qui fait partie de l’IUGS. À tous les niveaux de cette institution, le vote de la SQS a reçu un « soutien massif ».

« C’est une réticence à prendre en compte le temps court »

Un soutien institutionnel qui dissimule une sérieuse consternation parmi la vaste communauté scientifique. En 2009, l’IUGS avait constitué une équipe multidisciplinaire d’une trentaine de chercheurs, le Groupe de travail sur l’Anthropocène (AWG), chargée de mettre en avant la proposition de « validation stratigraphique » de l’Anthropocène. Pour une période de quinze ans, l’AWG a rassemblé des documents scientifiques pertinents et a finalement suggéré de marquer le début de la nouvelle ère géologique en 1950. Une date en ligne avec la demande des stratigraphes : une nouvelle ère géologique doit être définie par des transformations à grande échelle de la Terre, qui peuvent être durablement identifiées dans les sédiments, les roches ou même la glace.

Cependant, depuis le milieu du XXe siècle, « les couches sédimentaires de l’Anthropocène diffèrent de celles de l’Holocène, a argumenté l’AWG. Elles peuvent être identifiées par plus de 100 signaux de longue durée, y compris des radionucléides anthropiques, des microplastiques, des cendres et des restes de pesticides, dont la plupart ont commencé à s’accumuler au milieu du XXe siècle ». La trentaine de membres de ce groupe avait exprimé presque à 90% leur soutien à la validation stratigraphique de l’Anthropocène. Pourtant, leur proposition n’a pas été acceptée par les membres de la SQS.

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