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« Décès du primatologue Frans de Waal »

Après quatre décennies d’études sur les chimpanzés et les bonobos, Frans de Waal s’est lassé de la question constant : « qu’est-ce qui distingue les humains? ». Il a même suggéré, il y a une décennie, un arrêt des études comparatives entre les humains et nos parents primates. « Dans mon existence, j’ai vécu environ vingt-cinq différentes hypothèses sur ce qui distingue l’homme. Toutes sont démenties. Nous gaspillons notre temps. (…) Pourquoi est-ce que nous cherchons constamment ce qui nous rend uniques ? », déclarait-il au Monde en 2016. À un journaliste qui le critiquait en lui demandant si l’humanité n’avait rien d’unique, Frans de Waal rétorquait, exhibant un sourire, que seules notre arrogance se distingue peut-être.

Mi-blague, mi-vérité profonde,: une expression favorite de ce primatologue. Il est déploré par d’innombrables lecteurs qui adoraient son style particulier, un amalgame savant d’expériences scientifiques, d’anecdotes divertissantes et de réflexions intellectuelles extrapolées de ses dix-sept ouvrages. Ils doivent maintenant faire sans lui. Frans de Waal, d’origine néerlandaise et naturalisé américain, est décédé d’un cancer gastrique à Atlanta, en Géorgie, où il résidait depuis 1981. Il avait 75 ans à son décès le 14 mars.

Bien que son affection pour les primates ait dominé sa vie, c’est en élevant des choucas à Bois-le-Duc aux Pays-Bas que cet homme, quatrième garçon d’une famille de six frères, né le 29 octobre 1948, a compris la profondeur et la diversité des comportements animaux. Ces observations ont rapidement attisé sa passion qui l’a guidé vers l’ornithologie. Néanmoins, en rencontrant Jan van Hooff, un pionnier dans l’étude des émotions des primates à l’université d’Utrecht, son parcours a pris une autre direction. Il a été remarqué pour son imagination et sa rigueur par ce maître, qui lui a confié un projet de six ans au zoo d’Arnhem en 1975, ce qui coïncidait avec la plus grande colonie captive de chimpanzés du monde à l’époque, ceci en parallèle à sa thèse sur les alliances des macaques à longue queue.

Frans de Waal, en se basant sur cette expérience, a rédigé son premier ouvrage en 1982 (La Politique du chimpanzé, éd. du Rocher), qui a été traduit en français dix ans plus tard. Il souligne que les mâles ont recours à la force et parfois font preuve d’une violence extrême, cependant, cette caractéristique n’est pas au cœur de sa recherche.

Pour la première fois, le chercheur expose les « tactiques politiques » mises en œuvre pour progresser dans la hiérarchie sociale. Le mâle alpha n’est pas forcément le plus fort, mais il est toujours celui qui est capable de tisser les meilleures alliances, une caractéristique qu’il n’hésite pas à désigner comme « machiavélique ». Son travail d’imputation de caractéristiques humaines aux animaux, une pratique souvent frappée d’interdit dans le domaine de l’éthologie, a suscité diverses réactions de ses pairs, allant de l’irritation à l’admiration pour la précision de ses observations. Quant aux lecteurs, ils étaient déjà séduits.

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