L’expression « Financialisation de l’offre de soins » peut être complexe à comprendre. Pourtant, elle fait référence à l’une des préoccupations majeures dans le secteur de la santé aujourd’hui : la crainte de voir de nouveaux acteurs privés investir dans le domaine des services de santé, exposant ainsi ce secteur à une possible commercialisation abusive.
Afin d’éclairer cette tendance actuelle, une mission d’information de la commission des affaires sociales du Sénat, dirigée par un groupe de trois parlementaires – Bernard Jomier (Place Publique, Paris), Corinne Imbert (Les Républicains, Charente-Maritime) et Olivier Henno (Union des Démocrates et Indépendants, Nord) – a publié un rapport le mercredi 25 septembre, fournissant un premier état des lieux conséquent sur cette préoccupation. Le titre du rapport, bien que posé sous forme de question, en dit long sur son contenu : « Une OPA sur la santé ? ».
Le rapport de 256 pages révèle que dans certains secteurs, le passage à une approche plus commerciale est déjà bien avancé. C’est notamment le cas avec les cliniques à but lucratif, où quatre grands groupes détiennent près de la moitié du marché français (Ramsay santé, Elsan, Vivalto et Almaviva). Il en est de même pour les laboratoires de biologie, considérés comme le « secteur le plus financiarisé » en matière de soins de ville, dominé par quelques grands groupes (six d’entre eux contrôlent aujourd’hui les deux tiers des sites). Ce secteur est actuellement en pleine confrontation avec l’Assurance-maladie : nombreux sont les laboratoires de biologie médicale qui ont fait grève du 20 au 23 septembre, en protestation contre l’application de tarifs réduits.
Pour les autorités publiques, la situation reste une « boîte noire ».
Cette tendance s’est propagée récemment à d’autres domaines et se multiplie rapidement. C’est le cas de l’imagerie médicale qui est très dynamique et dont 20 à 30 % est capitalisé. De plus, les centres de santé – particulièrement les centres dentaires et ophtalmologiques – les pharmacies, ou encore les centres de soins primaires qui rassemblent des généralistes, attirent de plus en plus l’attention des investisseurs (Ramsay Santé, Ipso).
Les enquêteurs examinent cette transition d’un « capitalisme professionnel » où médicins, pharmaciens, biologistes, etc. gardent le contrôle des moyens de production des cabinets et des cliniques, vers un « capitalisme financé » où les investisseurs externes prennent la contrôle financier et stratégique de ces entreprises.
Et ensuite? Si le rapport mentionne que cet investissement est « profitable » et « sûr » pour les groupes privés, atteignant parfois jusqu’à treize à quinze fois l’excédent brut d’exploitation dans le domaine de l’imagerie, il soulève cependant des questions sur la rémunération de ces acteurs qu’il qualifie de « boîte noire » pour le gouvernement. Il questionne grandement la capacité des autorités supervisantes, les agences régionales de santé (ARS) et l’Assurance-maladie, à contrôler ce processus, et à assurer « l’accessibilité, la qualité et la pertinence des soins ».
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