Il est couramment admis que les Français et les Arabes partagent certaines valeurs communes, notamment le sens de l’honneur, le courage, l’expression sincère de vérité et d’autres aspects de la rigueur morale. Rifaa Tahtawi, commentateur égyptien de la Révolution française de 1830, est l’auteur de cette observation. Tahtawi a étudié ce bouleversement en détail depuis Paris, où il était la figure d’autorité pour une délégation d’étudiants boursiers du gouvernement égyptien. Tahtawi était lui-même un imam de l’université Al-Azhar du Caire, l’une des plus estimées de la communauté islamique mondiale.
Suite à son immersion en France, Tahtawi a rédigé « L’Or de Paris » paru en 1834 au Caire. Dans ce livre, il conseille vivement à ses correligionnaires d’apprendre les sciences, les arts et les métiers, qu’il a vus excellés en France. Cependant, Tahtawi n’est qu’un parmi les nombreux arabes dont Paris a marqué la vie de manière significative. Comme le souligne Coline Houssais dans son livre « Paris en lettres arabes », paru récemment chez Actes Sud, de nombreux exemples de ce genre sont retracés à travers divers documents. Le livre nous fait voyager des « Mille et une nuits » aux « mamelouks ».
À bien des égards, Gabriel Sionite, un moine maronite du Liban, est considéré comme le pionnier des Arabes de Paris, son nom est la version francisée de Jibril Al-Sahyuni. Il a vécu dans la capitale française de 1614 à 1642, où il a participé à la création d’une imprimerie arabe éphémère, et a effectué de nombreuses traductions en français et en latin. Il a également enseigné l’arabe à ceux qui allaient devenir les futurs représentants de la France au Levant. Cependant, il a été le premier de ces érudits arabophones à être ignoré par les orientalistes français, qui ont revendiqué tout le crédit pour ce type de travail, réduisant leurs collaborateurs arabes à de simples « correcteurs » ou « typographes ». C’est pour cette raison qu’Antoine Galland est devenu célèbre en 1717 pour sa traduction française des « Mille et une nuits », alors que certains des contes les plus connus, tels que ceux d’Ali Baba et de Sindbad, ont été relayés par l’éminent polyglotte Hanna Dyab, qui a accompagné Galland de Alep à Paris et est resté dans son ombre par la suite.
En 1798, le général Bonaparte entreprend une mission en Égypte qui s’achève trois ans après en catastrophe pour l’armée française. Pour protéger leurs alliés locaux de potentielles répercussions, ils les escortent par centaines vers la France à bord de leurs navires. Malgré leur manque de rôle militaire, ces « réfugiés d’Egypte » sont grossièrement appelés « mamelouks ». Elias Pharaon, qui a servi de traducteur à Bonaparte en Egypte, est promu au poste de consul de France aux îles Ioniennes. Par ailleurs, Raphaël Zakhour enseigne l’arabe à une génération de scientifiques français, dont l’égyptologue Champollion. Dans le contexe de ces relations fortement nouées entre la France et l’Egypte, on note le passage de Tahtawi à Paris, de 1826 à 1831, suivi par l’instauration d’une « École militaire égyptienne » au 97 boulevard Saint-Michel, qui opère de 1844 à 1849 pour former des officiers venant directement du Caire. Cette suite de l’article est accessible uniquement aux abonnés, et il reste encore 42.78% à découvrir.
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