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24 mars 2024 15 h 09 min

« Cantine Municipale Cultive Légumes Bio »

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Les jeunes trouvent délectable la mousseline d’épinards et le bouillon de navets. Pour en avoir un aperçu, faites un détour par le jardin d’enfants Paul-Vaillant-Couturier à Villejuif, dans le Val-de-Marne. Rencontrez d’abord la fermière qui livre ses légumes à l’aube – poireaux, carottes, navets, courges, et patates douces, épinards, céleris, blettes et oignons – arrachés de la terre juste la veille à Tannerre-en-Puisaye, dans l’Yonne.

Bavardez ensuite avec le cuisinier, Chadhuli Moindjie, qui fait sauter tous ces navets en petits morceaux. Son sourire en dit long sur son bonheur de « manipuler ces beaux légumes frais et issus de l’agriculture biologique ». Laissez-vous ensuite tenter par les paroles de la directrice de la crèche, Florence Arondel, qui porte de jolis sabots rouges et qui évoque « l’arôme de la mousseline de butternut ou de navets en préparation ». « Rien à voir avec les conserves ou surgelés d’antan. Les petits en sont fous, ils dévorent les soupes à la cuillère! ». Finalement, faites la connaissance d’un papa – Bakari, formateur en sports – ravi que sa petite fille Abbi ait l’occasion de déguster des aliments « extrêmement sains » mais généralement hors de son budget « qu’il n’achète pas fréquemment, hélas ». Abbi, deux ans et demi, avec sa tétine et sa capuche rose, est trop jeune pour exprimer son affection pour les légumes bio de saison.

En explorant les origines du savoureux potage de navets, on se retrouve sur la route rustique de la ferme municipale. Située à Villejuif, en pleine et dense couronne de Paris, la ville cultive maintenant ses propres légumes biologiques, à l’instar de 93 autres municipalités et villages français. Le maire qui, au cours des quatre ou cinq dernières années, ne parle pas de sa ferme municipale, de son embauche de maraîcher biologique, de son adjoint « ville nourricière » ou de « souveraineté alimentaire » est presque passé à côté de sa vocation.

« Il y a une réconciliation entre l’urbanisme et l’agriculture, » dit Pierre Garzon, le maire de Villejuif. Six crèches de la ville sont maintenant alimentées par les carottes municipales. Par chance, « nous cherchions à acquérir un terrain pour les nombreux enfants de nos centres de loisirs dont les perspectives sont trop limitées, » ajoute-t-il. La commune cherchait un champ avec un point d’eau à moins de deux heures de voiture pour les sorties en plein air… « Nous avons finalement trouvé un, dans l’Yonne, » continue le maire (Parti communiste français), élu en 2020. « C’était une ferme maraîchère biologique de 13 ans qui était mise en vente, par manque de débouchés. Quel gaspillage! En même temps, nous n’arrivions pas à trouver des fournisseurs en Ile-de-France pour augmenter la part de bio dans nos cantines. Nous payions très cher des fruits et légumes qui venaient parfois de l’autre côté du globe… »

La commande publique est soumise à des restrictions qui interdisent la favorisation d’un producteur local spécifique. Cependant, M. Garzon et son équipe ont contourné cette règle en achetant une ferme locale de 12 hectares, dont trois étaient déjà en exploitation. Ils ont ensuite embauché la maraîchère du lieu comme employée municipale. Le mouvement a suscité une opposition, la majorité le qualifiant de nostalgique des pratiques bolcheviques. La question se posait alors : était-il opportun pour une ville de s’occuper de la production de légumes ? Mais M. Garzon est resté convaincu de sa décision. Depuis l’acquisition de la ferme le 24 octobre, les premières cagettes de légumes ont été livrées début novembre. La maraîchère en charge, Isabelle Gauffeny, bénéficie désormais d’un revenu stable de 2400 euros net par mois, de ses week-ends, et surtout, d’une « sérénité » qu’elle n’avait pas précédemment. Le reste de l’article est réservé aux abonnés.