
Dans un recoin discret d’un café de la banlieue de Saint-Brieuc, deux éleveurs de porcs se sont discrètement rencontrés avec Le Monde. Ces éleveurs, qui représentent un collectif de 308 agriculteurs, sont actuellement impliqués dans un conflit avec Cooperl Arc Atlantique. Cette coopérative porcine, la plus importante de France, enregistrait un chiffre d’affaires de 2,79 milliards d’euros en 2022 et regroupe 3 000 agriculteurs partenaires et 7 700 employés. Les agriculteurs ont refusé d’être identifiés par leurs noms complet pour éviter des représailles potentielles. Ils ont fait savoir leur intention de reprendre le contrôle de leur coopérative.
Ces allegations ont été confirmées par le cabinet d’avocats Chatain Associés, basé à Paris, qui a réclamé à leur nom la destitution du conseil d’administration actuel de la coopérative et l’élection d’une nouvelle équipe lors de l’assemblée générale annuelle prévue pour le 21 juin. L’avocat Antoine Chatain a souligné que les statuts de la coopérative permettent un tel mouvement s’il est soutenu par un dixième des adhérents.
La démarche orchestrée par les agriculteurs contraste avec la passivité habituelle du monde agricole face à ceux qui cherchent à bouleverser l’ordre établi. Le président de la puissante Cooperl Arc Atlantique, Bernard Rouxel, n’a pas souhaité répondre aux demandes de commentaires de Le Monde. L’affaire met en lumière l’opacité de la gouvernance de la coopérative.
Cette firme est un moteur économique majeur en Bretagne, une région où la moitié de l’élevage porcin en France est concentrée. Elle est classée parmi les dix plus grandes coopératives du pays, ces géants qui coordonnent et mettent en marché les productions de la majorité des cultivateurs. Certain nombre de ces firmes sont souvent la cible de critiques pour leur manque de transparence de gouvernance et de résultats financiers.
Ceci est notamment le cas pour Cooperl Arc Atlantique que le public a découvert lors de l’affaire du « cartel du jambon ». Le groupe breton a été condamné, avec plus d’une dizaine d’autres, pour des arrangements sur les tarifs. Le 7 mars 2024, la Cour d’appel de Paris a confirmé la culpabilité de Cooperl Arc Atlantique, en réduisant cependant l’amende à 13 millions d’euros. La firme a ensuite annoncé son recours en cassation.
Siégeant aux côtés de Bertrand, Grégoire – un prénom fictif – tient à défendre sa coopérative comme un outil « indispensable ». Il prétend s’engager à « réinstaurer la démocratie » dans une organisation qui agit « maintenant comme un bulldozer ». L’éleveur, lié par un contrat renouvelable tous les cinq ans, est irrité de devoir payer des produits et des services plus coûteux à sa coopérative que ailleurs, alors qu’elle négocie le bétail à des tarifs moins avantageux que ceux offerts au Marché du porc breton, la référence nationale.
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