Alexandre et Piotr, deux jeunes hommes qui préfèrent ne pas révéler leur identité, discutent rapidement des détails de la nouvelle vague de mobilisation lancée ce automne. Leur échange a lieu sur un escalator de métro, un lieu improbable à Moscou. Ils parlent de l' »opération militaire spéciale » du Kremlin en Ukraine. Des volontaires sont recrutés pour cette mission et sont annoncés à travers une campagne de publicité dans les rues de la capitale.
Des petits stands à l’entrée des principales stations de métro, comme à Kievskaïa, sont devenus des centres d’information pour le recrutement. Kievskaïa, la gare qui porte le nom de la capitale ukrainienne, arrive à point. Alexandre siège derrière une table, recouverte de dépliants vert et bleu glacé de l’armée. Il se trouve entre les escaliers roulants et les tourniquets pour répondre aux questions de Piotr, un passager en transit, un jeune homme robuste aux yeux résolus bien qu’il soit peu loquace. Leur conversation dure à peine une minute. Alexandre a accompli son devoir d’information et Piotr repart avec la promesse de revenus très attrayants. Il pourrait gagner jusqu’à 5,2 millions de roubles en une année, ce qui équivaut à plus de 50 000 euros.
Alexandre, avec un air ironique, confesse qu’ils s’impliquent pour des raisons patriotiques mais aussi pécuniaires. En duo, lui et d’autres employés du métro s’occupent continuellement des tables de recrutement. En effet, ils sont tous engagés dans la lutte pour la victoire, car le métro symbolise la ville, et la ville incarne l’état. Il ne manque pas de faire des commentaires sur le « régime fasciste de Kiev » qui recrute des « mercenaires français » pour assister l’OTAN contre la Russie. Ces déclarations font partie du discours répété par le Kremlin et ses différents canaux de diffusion depuis deux ans et demi.
Des brochures et des affiches qui détaillent les salaires et bonus promis sont distribuées partout dans la ville, des stations de métro aux immeubles résidentiels, et jusqu’à l’entrée des magasins. Ces avantages sont financés par le ministère de la défense et la mairie de Moscou. Au moment de l’engagement, une récompense de 2,3 millions de roubles sera donnée, suivie d’un salaire mensuel d’au moins 260 000 roubles. Selon Bloomberg, les dépenses militaires augmenteront de 25% en 2025 pour représenter 40% des dépenses totales de l’État, soit 6,2% du PIB, un niveau inégalé depuis la période post-soviétique.
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