Francis Ford Coppola, grâce à son métier de viticulteur, a pu financer son dernier chef-d’œuvre, « Megalopolis ». Après une hiatus de treize ans, il fait un retour triomphant à la réalisation. En désaccord avec la tendance « fast-food » actuelle d’Hollywood, son film est une offre délicieuse, atypique, aux nuances subtiles et envoûtantes. À 85 ans, l’éminent cinéaste est tout comme ses vins : il est riche, intellectuellement stimulant et il se bonifie avec l’âge.
Les scènes de « Megalopolis » sont projetées sur des bâtiments, dont les murs sont des écrans. Quel est le lien entre le cinéma et l’architecture ?
Dans le film « Huit et demi » (1963) de Fellini, le personnage principal est suffoqué dans une voiture, piégée dans un tunnel : cela illustre que le décor est avant tout une métaphore. La même idée est établie dans « Megalopolis ». Le personnage incarné par Adam Driver, Catilina, embrasse une femme au sommet d’un gratte-ciel, c’est une action effroyable qui va changer radicalement sa vie. Selon la culture indienne, les opposés se rencontrent : la création est synonyme de destruction. Cependant, notre cerveau interprète chaque élément en lien avec notre survie. À cet égard, tomber n’est pas un signe d’élévation, mais de danger mortel. Y a-t-il une erreur dans cette interpretation ? C’est aux artistes et aux mythologues d’éclaircir le véritable sens des choses.
« Megalopolis » est-il un film épique ?
Comme Rome était le cœur de l’ancienne civilisation, l’Amérique est à présent au centre de l’attention, principalement les États-Unis qui se sont fortement imprégnés de l’essence romaine ; à savoir ses institutions, ses règles juridiques ainsi que son architecture. L’écho de l’histoire romaine en 509 av.J.-C. quand les Romains ont expulsé leur roi et ont fondé la République, se fait sentir à travers les actions de nos pères fondateurs, qui ont rejeté l’idée d’être une colonie soumise au roi d’Angleterre. L’architecture romaine s’exprime également à travers l’exemple de la Pennsylvania Station, une gare spectaculaire à New York qui a été démolie en 1963, construite à l’image des thermes de Caracalla. J’ai toujours été attiré par la réalisation d’un film de péplum, car il offre des éléments clés attractifs : des combats intenses, des femmes au caractère fort, des esclaves, des empereurs déments… Les films percevant le genre du péplum reflète l’idéologie de l’époque. Ainsi, « Spartacus » (1960) de Kubrick, met en lumière la lutte pour les droits civils des Afro-américains. En découvrant le complot de Catilina contre Cicéron, cela m’a fait penser au conflit entre les élus de New York et l’urbaniste Robert Moses (1888-1981)…
Il est dit que pour préparer le film, je suis allé visiter Arcosanti, une ville utopique dans le désert de l’Arizona. Est-ce une rumeur ou la réalité ?
J’ai passé quatorze jours en tant que chef et j’ai été fasciné par la façon dont la ville s’adaptait au climat, utilisant l’air frais de la nuit pour rafraîchir les maisons sans consommer d’énergie. J’ai visité divers lieux où l’utopie était tangible, tels qu’Arcosanti et Curitiba au Brésil. J’ai réalisé que plus une cité est en harmonie avec la nature, mieux c’est. Au lieu de structures en béton, nous pourrions habiter des fleurs, des pommes de pin et des forêts, surtout maintenant que nous comprenons le génome des plantes. Je souhaite une architecture vivante, qui vous affectionne et vous soutient comme un ami – vous protégeant quand il pleut et laissant le soleil briller quand il fait beau.
Il reste encore 78.09% de ce texte à lire et l’accès est limité aux abonnés.
Laisser un commentaire